Les thérapies numériques promettent de révolutionner la prise en charge des patients. Mais leur efficacité est intrinsèquement liée à leur usage régulier. Comment s’assurer que les patients adoptent durablement ces nouveaux outils, loin du regard du médecin ? Plongez dans les mécanismes qui favorisent l'adhérence des patients à ces dispositifs médicaux numériques.
On sait les difficultés de certains patients à appliquer les recommandations de leur médecin, y compris pour la prise d’un médicament. Alors pour une application mobile qui a pour but de leur faire changer d’habitudes, le défi de l’adhérence peut sembler colossal. Il existe en effet des thérapies numériques, au bénéfice clinique prouvé, qui accompagnent les patients au-delà de la consultation avec un programme d’activités et d’éducation thérapeutique.
Ces thérapies numériques peuvent être prescrites par le médecin et prises en charge par la sécurité sociale, et l’acte de prescription est en l’occurence un des premiers leviers pour favoriser l’adoption par les patients. C’est une chose de leur recommander oralement 5 minutes d’étirements par jour, ou une réduction progressive de la cigarette — c’en est une autre de leur prescrire sur une ordonnance un outil numérique qui permet d’accéder à des conseils et exercices “approuvés par la HAS” n’importe où, n’importe quand.
En effet, les thérapies numériques sont intrinsèquement conçues pour favoriser un usage répété. Et pour améliorer la “rétention” du patient sur l’app, elles appliquent les modes d’action qui ont fait leurs preuves dans d’autres champs : les outils de travail et de productivité, les jeux vidéo.
L’efficacité de ces modes d’action numériques dans le contexte d’applications mobiles de santé a été évaluée dans les meta-analyses suivantes :
Les défis de l’engagement et de la rétention dans les applications mobiles de santé
Amagai S, Pila S, Kaat AJ, Nowinski CJ, Gershon RC. Challenges in Participant Engagement and Retention Using Mobile Health Apps: Literature Review.
J Med Internet Res. 2022 Apr 26;24(4):e35120.
doi: 10.2196/35120.
PMID: 35471414; PMCID: PMC9092233.
Les facteurs de succès dans le déploiement d’applications mobiles de santé mentale auprès d’un public âgé de 15 à 25 ans
Bear HA, Ayala Nunes L, DeJesus J, Liverpool S, Moltrecht B, Neelakantan L, Harriss E, Watkins E, Fazel M. Determination of Markers of Successful Implementation of Mental Health Apps for Young People: Systematic Review.
J Med Internet Res. 2022 Nov 9;24(11):e40347.
doi: 10.2196/40347.
PMID: 36350704; PMCID: PMC9685513.
Quels sont ces mécanismes et comment s’appliquent-ils dans une thérapie numérique ? Dans cet article nous verrons ce qui produit l’adhérence et l’engagement du patient :
Au fondement des thérapies numériques (ou DTx, pour Digital Therapeutics), il y a la plupart du temps un programme d’activités quotidiennes :
Mais suivre un programme qui semble générique peut avoir un effet assez délétère sur la motivation. Il est important que le patient sente que le programme est pertinent pour ses symptômes et sensations, et s’adapte à son évolution. Une façon de faire cela est d’accompagner l’activité par un sondage : Comment vous sentez-vous ? Était-ce difficile d’atteindre l’objectif ? Avez-vous bien compris ? Etc.
Dans l’exemple ci-dessous, l’application Vivira (dédiée à la lombalgie) propose une évaluation après chaque exercice. Ici le patient n’a qu’à choisir “Oui” ou “Non” à la question test qui est posée :
Ainsi, l’application peut adapter la suite du programme en fonction des retours du patient : un exercice moins intense, un contenu explicatif plus accessible, un objectif moins ambitieux.
Par exemple dans une application dédiée à l’anxiété ou aux troubles addictifs, si le patient déclare "être stressé”, alors l’application lui suggérera des exercices en lien avec la gestion de son stress (relaxation, méthodes de respiration, etc.).
Comme certains médicaments doivent être pris chaque jour à la même heure, la régularité est clé pour l’effet thérapeutique d’une thérapie numérique. C’est en agissant un petit peu tous les jours que le patient verra sa condition s’améliorer. Mais il serait naïf de compter uniquement sur sa motivation et sa discipline.
Pour diminuer le risque d’abandon, les athérapies numériques utilisent une fonction incontournable des smartphones : les notifications push, qui rappellent régulièrement aux patients d’ouvrir l’application et d’y accomplir une action (activité, exercice, lecture, auto-évaluation…). Celles-ci peuvent même adapter leur contenu et leur fréquence au comportement du patient : s’il ne s’est pas connecté depuis plusieurs jours, ou n’a pas terminé une activité en cours, il recevra une notification du type “N’oubliez pas votre programme [nom de l’application], c’est important pour votre bien-être”.
Dans un autre registre, l’application d’apprentissage des langues Duolinguo est le parfait exemple de l’efficacité de ces rappels pour inciter ses utilisateurs à faire leur leçon du jour. Leur taux de rétention bat des records.
Dans le monde du numérique, la gamification (ou ludification) est une technique éprouvée pour améliorer l'engagement des utilisateurs. Elle consiste à intégrer des éléments de jeu dans des contextes non ludiques, pour renforcer la motivation.
Transposé aux thérapies numériques, cela se traduit par des récompenses pour les progrès réalisés ou les objectifs atteints. Ces récompenses tout à fait virtuelles peuvent prendre la forme de badges, de points, de niveaux à franchir ou même de messages d'encouragement.
Par exemple, après une semaine d'exercices réguliers, l'application pourrait féliciter le patient et lui offrir un badge "7 jours consécutifs". L’effet est décuplé si l’utilisateur peut partager ce signe de reconnaissance avec ses pairs. Ces mécanismes de récompense exploitent le biais de renforcement (entre autres) pour nourrir la motivation et encourager la persévérance.
Une application non thérapeutique qui les utilise très bien est Strava, qui permet de partager avec ses amis ses performances sportives, et les “médailles” associées.
Dans l’application Zemedy, qui aide à gérer le syndrome de l’intestin irritable, la patiente reçoit des badges et mesure ses progrès.
Le feedback, ou retour d'information, est essentiel pour aider les patients à comprendre et à évaluer leurs progrès. En fournissant un retour immédiat sur les actions réalisées, l'application permet au patient de savoir s'il est sur la bonne voie ou s'il doit ajuster ses efforts.
Ce raisonnement s’appuie sur les recherches effectuées autour du neuro-feedback, la méthode qui consiste à donner en temps réel une représentation visuelle et sonore des ondes cérébrales pour permettre au patient d’ “entraîner son cerveau” à faire face à différentes situations (stress, douleur, besoin de concentration…).
Qu’est-ce que le neuro-feedback ?
D. Corydon Hammond, What Is Neurofeedback?
Journal of Neurotherapy, vol. 10 no 4 (2006)
DOI: https://doi.org/10.1300/J184v10n04_04
Ce feedback peut être aussi simple qu'une petite animation à l’écran quand on a terminé une tâche. Ci-dessous l’exemple de l’outil de productivité Asana, qui propulse une licorne à travers l’écran dès qu’une tâche est marquée comme complétée :
Dans le cas d’une thérapie numérique, le feedback peut aussi prendre la forme d’un graphique montrant l'évolution des symptômes sur une semaine ou un mois, ou d’une information plus élaborée comme une analyse détaillée des tendances.
Par exemple, après avoir noté ses symptômes ou épisodes aigus pendant plusieurs jours, l'application pourrait montrer au patient comment ils évoluent en fonction de ses activités ou de son alimentation. Dans l’exemple ci-dessous, l’application Oviva (pour lutter contre l’obésité) donne un aperçu de l’évolution du poids sur le dernier mois.
L’interaction humaine et sociale est un puissant levier de motivation. En permettant aux patients de partager leurs expériences, leurs défis et leurs réussites, les communautés de patients proposées par certaines thérapies numériques peuvent réduire le sentiment de solitude et favoriser la pair-aidance, ou tout simplement le soutien mutuel.
Ces échanges peuvent se faire via des forums, des groupes de discussion ou des chats en direct. En partageant leurs histoires, les patients peuvent trouver du réconfort, des conseils et des astuces pour mieux gérer leur condition. De plus, savoir qu'ils ne sont pas seuls dans leur combat peut être un puissant moteur d'adhérence au traitement.
C’est un levier couramment utilisé par les applications contre le tabagisme, et plus récemment par les applications pour gérer l’endométriose, comme Lyv (ci-dessous).
L'ère du numérique a vu l'émergence des smartphones comme outils omniprésents dans notre quotidien. Ces appareils, accessibles à travers toutes les tranches d'âge et classes socio-économiques, ont ouvert la voie à une révolution dans le domaine des soins de santé. Les thérapies numériques, ou DTx, s'inscrivent dans cette tendance, offrant des solutions innovantes pour accompagner les patients au-delà de la consultation.
Mais pour une adoption massive, qui aura un effet sans précédent sur la santé publique, les fabricants d’applications ne comptent pas sur la seule recommandation du médecin. Ils intègrent des mécanismes d'usage et de rétention, tels que la personnalisation, la gamification, les rappels, le feedback et la création de communautés, qui jouent un rôle essentiel dans l'adhérence des patients et le succès clinique.
Une barrière à ne pas négliger reste cependant celle du coût. Au-delà de la prescription par le médecin, la prise en charge par les assurances maladie, et en particulier par la CNAM, est un élément essentiel pour favoriser leur diffusion : c’est l’objet du programme PECAN du ministère de la Santé.
Mais si l’accès au remboursement est trop compliqué pour les patients, ils seront trop nombreux à abandonner avant même d’avoir téléchargé l’application prescrite (comme c’est malheureusement le cas en Allemagne pour les DiGA). Pour faciliter cette étape cruciale du parcours, AppThera lance prochainement sa plateforme de prescription pour permettre :
En alignant tous ces facteurs, on pourra créer des changements profonds et durables dans les comportements et prévenir massivement l’apparition de maladies et polypathologies dans notre société.
Avec AppThera, nous identifions les thérapies numériques avec de la preuve clinique et facilitons leur prescription et délivrance aux patients. Vous avez des questions ou des remarques ? Contactez-nous !
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